
Cameroun/Interview : Jean Baptiste Atemengue « En 2025, on peut véritablement dire que les conseils régionaux vont enfin décoller puisque leurs ressources fiscales sont sûres et connues en volume. »
M le Maire de de la Commune d’Arrondissement de Ngoumou, Jean Baptiste Atemengue Amvouna à propos de l’implémentation de la décentralisation au Cameroun, 5 ans après l’avènement des Régions
1– ces derniers temps vous êtes sous le feu des projecteurs concernant les lenteurs dans le transfert des ressources et des compétences dans le cadre de la Décentralisation. Comment comprendre vos sorties à ce sujet ?
R1- Le peuple camerounais a décidé de se doter d’une République unitaire décentralisée et en attend un changement significatif des politiques publiques en vue de l’émergence en 2035. Le Président de la République, Chef de l’Etat a proposé au parlement un ensemble de lois pour atteindre cet objectif. Ma conviction qui est aussi celle de la majorité des camerounais est que seule une décentralisation complète peut nous faire émerger rapidement et satisfaire les besoins primaires de nos populations. Il y a une telle pression démographique que si nous n’avançons pas vite dans ce transfert effectif des compétences et des ressources, notre jeune Etat et notre jeune démocratie seront véritablement en danger.
2 – jusqu’ en fin 2024 la Décentralisation affichait une évolution de moins de 10 %. Qu’est ce qui selon vous peut en être la cause de ce piétinement ?
L’application de la loi est variable selon les ministères. Il y en a qui ont beaucoup avancé comme le Ministère de la promotion de la femme et de la famille, les ministère des affaires sociales, le ministère de l’agriculture et du développement rural, le ministère de l’éducation de base, le ministère des petites et moyennes entreprises, le ministère de l’élevage des pêches et de l’industrie animale, le ministère des travaux publics, le ministère de l’urbanisme et de l’habitat….Ces ministères doivent achever pour certains tout le processus et s’interdire de garder des ressources de façon illégale dans une gestion centralisée qui a montré ses limites. Les secteurs vitaux comme la santé et l’éducation secondaires piétinent. Pourtant les conseils régionaux et les communes, pour ce qui est de la santé peuvent pleinement assumer leurs responsabilités face aux populations. Et pour cause, les ministres et les fonctionnaires qui y travaillent n’ont aucun compte à rendre directement aux populations. Nous les élus, le Président de la République en tête, les conseillers municipaux en passant par les parlementaires et les conseillers régionaux avons des comptes à rendre directement au peuple. L’article 2 de la constitution dit que ce sont les élus qui incarnent la souveraineté du peuple. Les élus sont insultés partout alors que les Administrations retiennent les ressources que la loi a transférées aux élus pour les gérer avec les populations elles-mêmes.
3- 2025 est pour beaucoup d’acteurs de la Décentralisation une année d’accélération et d’atteinte de la vitesse de croisière dans sa mise en œuvre effective. Qu’est ce qui peut laisser dire cela ?
R3- la récente loi de modernisation de la fiscalité locale est un grand pas pour doter les CTD de ressources fiscales supplémentaires essentiellement par transferts de l’Etat central qui percevait ces impôts aux Conseils Régionaux et aux communes. En 2025, on peut véritablement dire que les conseils régionaux vont enfin décoller puisque leurs ressources fiscales sont sûres et connues en volume.
4- la Décentralisation fait partie du plan d’action du projet de société du Renouveau auquel vous êtes un fervent disciple. Comment entrevoyez-vous le Cameroun dans les années 2032 si tous les acteurs jouent bien leur partition surtout dans le volet social ?
R- 4 On a vu les résultats économiques et sociaux de la décentralisation ailleurs en Afrique. Au regard des résultats mitigés des politiques publiques centralisées au Cameroun jusqu’à présent, l’homme d’État expérimenté qu’est S.E. Paul BIYA a su tirer les conséquences en proposant ce qu’il a lui-même défini comme un approfondissement de la démocratisation de notre État. Nous avons un défi démographique majeur à relever et les CTD seules peuvent véritablement accélérer le développement de notre pays. Le faire c’est appliquer la vision du Président BIYA de décentraliser en ramenant au plus près des citoyens la réponse aux différentes demandes sociales.
Propos recueillis par Simon Metsengue