Grand Dossier / Crise Russo –Ukrainienne : coup fatal contre le CFA ?

Grand Dossier / Crise Russo –Ukrainienne : coup fatal contre le CFA ?

La Russie a pris la décision d’envahir l’Ukraine à qui elle reproche de vouloir intégrer l’OTAN et menacer à terme sa sécurité et son existence en tant que Nation depuis Février 2022. L’Occident a choisi pour sa part de ne pas intervenir militairement comme avec l’Irak en 1991 lors de l’invasion du Koweït. En revanche, elle a opté pour les sanctions économiques afin de fragiliser le Kremlin. Plusieurs Etats du monde ont été amenés à se prononcer sur ces sanctions aux Nations Unies parmi lesquels les Etats Africains. Si certains ont suivi le son de cloche occidental, plusieurs pays africains se sont abstenus de toute sanction à l’endroit du pays de Vladimir Poutine au rang desquels plusieurs pays de la zone Franc. Mais ces pays, qu’ils aient voté contre ou pour, cela n’aurait servi à rien car, la France, leur tuteur monétaire, avait déjà opté pour les sanctions qui les impliquaient tous. Depuis lors rien ne va plus entre la France et ses partenaires africains. Ils sont partagés entre une sortie rapide du FCFA ou mettre sur pieds des mesures de contournement de ces sanctions au nom de leur souveraineté et leur indépendance et la Russie le leur propose d’ailleurs. Quel avenir pour le FCFA si la France persiste avec ses sanctions contre la Russie engageant les pays de la zone FCFA ?

Souveraineté Monétaire : tenir les chaines et prétendre avoir affranchi l’esclave !

La crise russo-Ukrainienne pose la question de la souveraineté économique de certains Etats africains notamment ceux utilisateurs du FCFA. Comment des Etats dits indépendants peuvent laisser un Etat Etranger contrôler leur monnaie commune sans que lui-même en soit utilisateur au point de décider sans leur consentement avec qui coopérer ou pas ?

photo DR : Euro et Dollar

15 pays d’Afrique sont utilisateurs d’une monnaie commune bien avant leurs indépendances respectives : le Franc des Colonies françaises d’Afrique avant les indépendances, devenu Franc de la communauté Francophone d’Afrique en Afrique de l’Ouest et Franc de la coopération française d’Afrique en Afrique Centrale. Cette Monnaie trop forte arrimée à l’euro par une parité fixe, une convertibilité illimitée dont la garantie est assurée par la banque centrale Française a quelques particularités, notamment une non-interchangeabilité entre la zone Cemac et la Zone Uemoa et la retenue de 50% des recettes en devises des pays utilisateurs. Zone Franc France-Zone FCFA Cette situation impose à ces 15 pays d’Afrique de passer obligatoirement par la banque centrale de France pour leurs échanges internationaux. Les sociétés françaises qui sont installées dans ces pays rapatrient automatiquement leur bénéfice sans aucun contrôle des Etats tiers. Enfin, ces pays n’ont que deux possibilités sur trois à pouvoir venir à bout d’une crise économique : soit l’augmentation des impôts ou alors l’endettement. La 3ème mesure la plus grande, la planche à billet reste aux mains de l’Elysée. Cet instrument qu’est la planche à Billet est la clé de voûte de la majeure partie des problèmes sociaux que rencontrent ces 15 pays. Depuis les indépendances, ces pays connaissent des crises périodiques qu’on pourrait estimer à un rythme décennal. A un moment donné, ils connaissent un essor et un bien-être pendant 10 ans puis, sombrent dans une crise économique qui débouche vers une crise sociale avec pour conséquence des alternances hasardeuses au gré de celui qui tient les chaines. D’autres sont obligés d’élever les impôts au point de pouvoir asphyxier le tissu économique local encore embryonnaire et majoritairement informel. La moindre réclamation sociale débouche à un recours à l’endettement. Les hommes d’affaire de ces pays sont pour la plupart des importateurs ou tout simplement des bayam sellam. La COVID et la crise Russo –Ukrainienne auraient permis à certains pays africains de s’enrichir en stimulant leur culture de blé ou encore en enrichissant leur culture de tubercule pour tout simplement remplacer le blé par les farines de tubercules. Hélas, c’est une équation assez difficile, car, si l’autorité avait la planche à billet sous son contrôle, elle aurait augmenté les subventions aux agriculteurs puis aurait tout simplement acheté les intrants en rouble comme le font plusieurs pays pour contourner les sanctions Occidentales. En quelques mois, les pays comme le Cameroun, la Côte d’Ivoire ou encore le Gabon seraient à même de satisfaire le déficit causé par l’Ukraine. Mais avec de belles terres arables de ces pays et quelques soit la politique agricole qu’on peut élaborer en intégrant cet hydre, rien ne saurait se dessiner à l’horizon. Le moment de la rupture est peut-être arrivé si ces pays rêvent d’être émergents !

Cemac : Sortir ensemble ou mourir seul !

Les pays de la CEMAC soufflent le chaud et le Froid depuis le début de la pandémie Covid 19 et surtout depuis le début de la crise russo-ukrainienne en février dernier. Ceux-ci peinent à assurer leurs importations en denrées alimentaires à Cause des sanctions que l’UE a imposé à la Russie. Pourtant s’ils contrôlaient entièrement le FCFA, ils continueraient à échanger avec le Kremlin sans aucun problème. Que faire : sortir du FCFA pour le bonheur des populations ou alors contenter ses bourreaux ?

L es 06 pays de la C o m m u n a u t é économique et monétaire d’Afrique Centrale – CEMAC sont tous d’accord sur la nocivité du Franc de la communauté Francophone d’Afrique hérité de la colonisation contre l’épanouissement de leurs économies et de leur développement. Depuis Décembre 2019, ceux-ci n’ont pas souhaité faire des reformes sur cette monnaie comme l’avait suggéré la France. Réforme qui avait été néanmoins accepté par sa zone sœur d’Afrique de l’ouest UEMOA. Les 06 ont préféré continuer à travailler vers une zone économique plus dynamique et plus intégrante à 11 Etats de l’Afrique centrale regroupés autour de la Communauté Economique des Etats d’Afrique CentraleCEEAC. La crise sanitaire est venue conforter ces pays sur la nécessité de l’accélération du processus dont l’aboutissement a été fixé en 2024. Seulement, la crise Ukrainienne est venue exacerber les tensions déjà perceptibles entre la France et les Etats de la CEMAC. L’EU à l’unanimité a choisi d’imposer des sanctions économiques à la Fédération de Russie mais pas la CEMAC en revanche l’Elysée sans se référer à cette Zone économique Africaine a choisi d’acter certaines sanctions ayant une incidence sur la coopération entre la Russie et ces pays d’Afrique Centrale. La France a décidé en Mars de suspendre les échanges entre sa banque centrale et celle de Moscou. Chose qu’elle n’aurait pas dû faire sans l’accord exprès des pays de la CEMAC qui utilisent la banque Centrale Française comme garantie de la parité fixe du FCFA avec l’Euro pour leurs échanges. Dès lors la France de façon unilatérale contraignait ces pays à sanctionner la Russie alors même que ceux –ci se sont abstenus de toute sanction contre Moscou. Depuis, une tension vive se fait ressentir au sein de la sous-région contre l’Elysée qui, elle préfère distraire l’opinion par des propos outrageants à l’endroit de Yaoundé question de camoufler le réel malaise. Mais Yaoundé dans l’habitude qui est la sienne pose ses derniers pions pour un coup de grâce. La RCA de son côté a décidé d’amorcer la sortie du FCFA sans autre forme de procédure en adoptant le L es 08 pays de l’Union Economique et Monétaire d’Afrique de l’Ouest sont eux aussi confrontés à une crise alimentaire marquée par des pénuries qui font craindre des remous sociaux. Ces pays sont dépendant des importations de blé Ukrainien et Russe. Avec la guerre Russo-Ukrainienne qui continue de sévir en Europe, les importations sont perturbées par la Russie qui a interdit toute importation via la mer noire parfaitement contrôlée par elle. En début de mois juin dernier , le président en Exercice de l’Union Africaine-UA et président Sénégalais Macky Sall est allé plaider le sort de l’Afrique mais d’avantage celui de son pays et de la sous-région auprès de Vladimir Poutine Président de la Fédération de Russie, Mais ce plaidoyer est resté lettre morte. Pourtant, le président Macky Sall est allé présenter au Kremlin la situation assez délicate des pays africains qui pour certains se sont mis à l’écart des sanctions contre son pays. Mais Poutine sait très bien l’influence que l’Elysée a sur l’UEMOA. La preuve, malgré le vote du Sénégal contre les sanctions Russes, Dakar ne peut plus commercer avec la Russie s’il ne sort pas du FCFA. Le Sénégal, le Benin, le Burkina Faso, la Cote d’Ivoire, la Guinée Conakry, le Niger sont désormais l’otage des sanctions Russes imposées par la France sans leur consentement. Que valait vraiment leur vote ? Pas grand-chose. En revanche, le Mali a depuis l’an dernier commencé à se mettre en marge de la domination Française. La junte militaire au pouvoir a démantelé la base militaire française au Mali, et a littéralement contraint la France à revoir ses ambitions dans ce pays du sahel. Suivant le chemin de la RCA, le Mali a fait venir une force paramilitaire privée Russe, les Wagner pour lui prêter main forte dans sa quête pour le contrôle total de son territoire et a dû remercier la force barkhane qui a eu des piètres résultats durant plus d’une décennie. Il devient presqu’évident que le pays de Modibo Keita sortira dans les prochains mois du FCFA véritable obstacle aux échanges avec Moscou. Pourtant, l’annonce de la fin du FCFA en Décembre 2019 et la naissance de l’ECO avait suscité de l’espoir mais ceci sans avoir compris que ce n’était qu’un changement de nom et que le contenu restait le même. Ce changement de nom avait ceci de pervers qu’il venait tuer un projet plus large à la CEDEAO d’une monnaie commune. Mais la France est ses pays ont tôt fait de l’éventrer le 24 Décembre 2019. Pour des pays comme le Nigeria qui avaient mis assez d’énergie pour que ce projet voit le jour, c’était une véritable déception mais qui ne changeait pas grand-chose dans son vécu ce d’autant plus qu’Abuja stabilise son économie à travers le FCFA qui est une monnaie stable profitant aux voisins plutôt qu’aux pays utilisateurs. L’Eco, cette véritable Chimère est devenue pour ces pays une véritable entourloupe. La crise Russo-ukrainienne bat son plein, Poutine n’est pas prêt à baisser la garde, ces pays de l’UEMOA devront à terme choisir entre privilégier la continuité de la Françafrique ou alors éviter la famine de leurs populations en sortant du FCFA. FCFA Sortie du FCFA Bitcoin, Crypto monnaie sans officiellement s’être concerté au préalable avec ses pairs de la sous-région. Les autres pays Notamment, le Congo Brazzaville, la Gabon, la Guinée équatoriale sont accrochés aux lèvres de Yaoundé. Seul véritable réticent de cette démarche le Tchad. D’où sa désapprobation à accepter l’élection du Camerounais Evou Mekou à la tête de la BDEAC. La France essaie par le biais de la COBAC de freiner l’action en interdisant l’utilisation de la Crypto monnaie dans la sous région mais il est fort à croire que cette décision sera sans effet ce d’autant que la plus grosse économie et locomotive de la sous-région avait bien avant commis un document qui semblait être orienté vers un processus d’encadrement de cette nouvelle forme d’échange. Connaissant la démarche qui est celle de Yaoundé, on ne saurait vraiment dire qu’il est contre le développement de cette nouvelle forme d’échange ce d’autant plus que la France ne leur laisse plus choix. Tout ceci fait dire que la FCFA amorce en Afrique Centrale ses derniers moments ceci à cause de la condescendance et le mépris des accords de la part de la partie Française.

Proposé par : Simon METSENGUE

 

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